Bernard Guillot est né à Bâle en Suisse en 1950. Il vit entre Paris, le massif Central et l’Egypte. Il a toujours pratiqué la peinture et la photographie.
A la sortie des Beaux-Arts de Paris en 1975, il vivra plus de deux ans à New-York. Mais c’est l’Egypte et le Caire qui orienteront d’une manière décisive sa vie et son inspiration.
Bernard Guillot expose régulièrement son travail, en Europe, en Egypte, à New-York.
Il est lauréat d’une bourse Villa Médicis hors-les-murs (1989 – Etude sur la Nécropole du Caire) et d’un prix Nadar 2003 pour son livre Le Pavillon Blanc (Editions Filligranes) consacré à son hôtel du Caire.
Être convié à témoigner du mystère de la Passion est un honneur et plus encore un défi. La dimension si subjective, irrationnelle de la Passion, nous sommes tous invités, en notre âme et conscience, dans notre comportement, par nos expériences et par nos choix, à la vivre. Notre psyché est sollicitée dans ce qu’elle a de plus intime, que l’on appelle cela l’âme ou pas. Le drame de la mort du Christ est inscrit d’abord en nous, dans l’intimité souveraine de notre existence, de notre destin, dans le temps gravant de notre passage sur terre. C’est un lien direct, infiniment subtil, entre Dieu et nous. Tout le reste, parlant de l’imagerie, de l’illustration est un stockage de références, esthétiques et culturelles, cultuelles, où font ménage signalétique du pouvoir, conjuration ou exorcisme.
Je crois que ce que nous proposons sur la place publique, en l’occurrence la crypte de Notre-Dame de la Treille à Lille, se jouera sur ces deux versants. L’un étant plus éclairant, éclairé que l’autre ; celui de l’image et celui de l’icône.
celui de la peinture et celui de la posture.
la flamme et la fumée.
La photographie rendra je l’espère l’idée d’attente, de temps suspendu, de la prémonition d’un drame, en tout cas d’un basculement entre deux réalités. Nous pouvons alors, et par le biais d’une expérience à vif, photogravée, nous relier à ces jours de la Passion mais aussi à l’attente dans la Nuit. Quant aux encres de chine, elles ont été réalisées au Caire, dans le sillage de la révolution égyptienne, dont j’ai été le témoin. La dimension humaine se déployait avec passion, à une échelle universelle. Nécessité du noir et blanc. Je pense que les triptyques photographiques renvoient aux trois croix sur le Golgotha, celle du Christ et celles des deux larrons.
Bernard Guillot- novembre 2016
- Trois photographies sont extraites de la série dite des plongeurs. Elle initie mon entrée dans le monde de la création, dans la vie. J’avais 17, 18 ans.
Elles parlent du passage d’une réalité à une autre, symboliquement aussi ; de la nécessité, pour l’accomplissement, d’un saut dans l’inconnu.
1967 – Paris – Tirage argentique
- La série dite de Saint-Sulpice, à Paris, réalisée dans cette formidable grotte qu’est cette église, est un témoignage intime de mon désarroi spirituel et existentiel, après mon retour d’un New-York des années 1970. Je vois cette série comme un parcours initiatique, en plusieurs stations, comme d’une lutte contre le Néant ; une étape cruciale dans la vie.
1979 – Eglise Saint Sulpice – Paris – Tirage argentique
- La photographie – autoportrait, faite dans le Sinaï, à Sainte Catherine, témoigne, dans l’urgence et la nécessité, d’un moment crucial de ma vie, au seuil de mes trente ans. C’est moi le larron.
1981 – Sainte Catherine du Sinaï – Egypte – Tirage argentique
- Le triptyque du Fayoum renvoie au désarroi de l’attente. Seraient-ils, ces touristes français perdus dans le désert égyptien, les soldats romains jouant aux osselets, non loin de la croix, dans la désolation du Golgotha ?
1979 – Dimet Essibaha – Fayoum – Egypte – Tirage argentique
- Le triptyque « Ce jour-là » a été réalisé à Tanis, une ancienne capitale ramesside du Delta du Nil, en Egypte, devenue une immense colline de ruines, de détritus : colosses (Ramsès II) effondrés au sol, débris, effacement d’un monde.
Ce jour-là, un mardi 25 janvier 2011, fut le premier jour de la révolution égyptienne. Nous ignorions tout alors de ce qui se tramait au Caire. Mais en nous, insidieusement, le sentiment de torpeur, de vide, d’effondrement, l’intuition d’un destin mis en question.
2011 – Tanis – Egypte – Tirage argentique
- « Les paysages de poussière (de quel désert ?) retrouvés dans l’enceinte de Notre-Dame-des-Miracles, ceux où le regard se dilue, se perd et cherche, ces paysages rejoignent celui, plus profond, de la Tragédie. Ces poudres confondues mais en dernier regard ordonnées sont la quintessence de ce qui doit s’effondrer de l’Homme. Ce qui doit se livrer aux forces de la Nuit obscure, sans laquelle aucune métamorphose n’est possible… »
Extrait du catalogue de l’exposition « A ciel ouvert » au Monastère Notre-Dame-des-Miracles à Saorge en France (été 2011).